-
Good time - Joshe & Ben Safdi (2017)
J'ADORE
Je découvre enfin le cinéma de ces deux jeunes frères SAFDI originaires du Queens et révélés en 2012 au Sundance (festival du cinéma américain indépendant). Voilà du cinéma ancrée dans notre temps ! qui dit quelque chose du cauchemar des sociétés sous surveillance et du caractère héroïque qu'il y a à tenter d'en sortir. Un hymne à la liberté, à l'instinct émancipateur, à l'amour fraternel inconditionnel donc hors la loi. Décliné sous une forme plastique et un dosage colorimétrique très original et toujours fidèles au 35 mn.
Sans doute que Connie (le beau Robert Pattinson) aime son frère prisonnier d'une maladie mentale : l'autisme comme les frères Safdi aiment une Amérique pas moins touchée mentalement. Je me risque à penser que le personnage émouvant de Nick (interprété par Ben Safdi him-self), emprisonné dans son autisme, est une métaphore de la société américaine d'aujourd'hui : enfermée par l'obsession de la surveillance généralisée (Nick a des tendances paranoïaques), violente (Nick se retrouve à l’hôpital après un bagarre pour le contrôle de la télécommande en prison), coupé de l'autre du fait d'un individualisme qui restreint la majorité des personnes à une bulle d'auto-divertissement devant écrans, mais constitué d'êtres touchants, peut-être pas complètement désenchantés? et surtout pris dans des souffrances larvées.
Alors il s'agit, malgré tout, de continuer à soutenir le peuple, avec le plus d'énergie possible, une énergie qui prendrait sa source non pas dans l'intelligence ou dans la science (le psychiatre est sans cesse ridiculisé dans film) mais dans l’irrationalité de l'amour seule force motrice à la hauteur du combat à mener... ou avec du bon cinéma populaire tel que le propose Joshe et Benny.
Quel portrait de la société américaine ! On peut noter que les blancs et les noirs y évoluent dans une égale torpeur, insensibilisés par les téléphones portables hypnotiques, par les programmes TV débiles, par une domestication de l'humain sous la menace permanente du carcéral, et par les drogues (médicaments inclus) qui semblent la seule alternative populaire pour supporter le monde tel qu'il est.
Superbe personnage de la jeune afro-américaine de 16 ans (Taliah Webster), fière que son ex soit un dealer, qui fume des spliffs avant de dormir mais qui est habillée comme un enfant en vadrouille à Disneyland. Triste et drôle à la fois !
Ou cette quinqua. Corey (Jennifer Jason Leigh) pétrit de chirurgie esthétique qui peut dépanner le beau Connie de 10 000 dollars contre l'illusion d'avoir une relation sentimentale.
Ou encore Ray (le génial Buddy Duress) qui panique à l'idée de retourner en prison, et qui traverse toutes ses galères de manière totalement halluciné, sous acide. Tout en sachant que l'acteur sort lui-même de prison pour trafic de stupéfiants quand il commence le tournage de ce film où il donne la réplique à Robert Pattinson (cf. son interview https://www.ssense.com/fr-fr/entrevue/ext-queens-evening-with-actor-buddy-duress)
Dans l'univers des SAFDI on peut retrouver la cruauté de CRONENBERG, la mise en valeur débordante des acteurs qui rappelle les frères COHEN, et l'opulence baroque de motifs et d'actions d'un SCORSESE. Avec une bonne pioche pour Robert Pattinson qui me semble entrer pas à pas (à force de bon choix) dans la cours de grands acteurs américains.
Un mot sur la bande son electro-rock composée par le musicien américain expérimental Daniel Lopatin (alias Oneohtrix Point Never). Sa partition electro psychédélique et obsessionnelle retranscrit l'état du personnage (Robert Pattinson) dans sa démence, sous l'influence du rock progressif du britannique Steve Hillage, des synthétiseurs analogiques du compositeur japonais Isao Tomita, ou encore du groupe Tangerine Dream. Il compose enfin la chanson finale "The Pure and the Damned" interprétée par Iggy Pop (lequel a écrit les paroles spécifiquement pour le film).
"The pure and the damned" (feat. Iggy Pop)
Love, make me clean
Love, touch me, cure meThe pure always act from love
The damned always act from loveEvery day I think about untwisting and untangling these strings I'm in
And to lead a pure life
I look ahead at a clear sky
Ain't gonna get there
But it's a nice dream, it's a nice dreamDeath, make me brave
Death, leave me swingingThe pure always act from love
The damned always act from love
The truth is an act of loveFiche technique :
- Titre original : Good Time
- Réalisation : Joshua et Ben Safdie
- Scénario : Ronald Bronstein et Joshua Safdie
- Photographie : Sean Price Williams
- Décors : Audrey Turner
- Costumes : Miyako Bellizzi
- Musique : Oneohtrix Point Never
- Producteurs : Sebastian Bear-McClard, Oscar Boyson, Terry Dougas, Paris Kasidokostas Latsis
- Producteurs délégués : Jean-Luc De Fanti, Stephanie Meurer et Alexis Varouxakis
- Coproducteur : Brendan McHugh
- Sociétés de production : Elara Pictures et Rhea Films
- Sociétés de distribution : A24 Films (États-Unis), Ad Vitam Distribution (France)
- Pays d'origine : États-Unis
- Langue originale : anglais
- Format : couleur
- Genre : thriller, policier
- Durée : 99 minutes
- Dates de sortie :
- France : 25 mai 2017 (Festival de Cannes - sélection officielle)
- États-Unis : 11 août 2017
- France : 13 septembre 2017
- Interdit aux moins de 12 ans lors de sa sortie en France
Distribution :
- Robert Pattinson : Constantine « Connie » Nikas
- Jennifer Jason Leigh : Corey
- Barkhad Abdi : Dash
- Ben Safdie : Nick Nikas
- Buddy Duress : Ray
- Taliah Webster : Crystal
- Cliff Moylan : agent Patrick
- Souleymane Sy Savane : le chauffeur Uber
- Rose Gregorio : Loren
- Marco A. Gonzalez : un agent de police
-
Commentaires